Flatiron Health: What If Big Data Could Help Us Fight Cancer?

10 July 2015 - Author : Laetitia Vitaud

This article is only available in French.

L’industrie pharmaceutique, les chercheurs et les médecins n’ont pas attendu le numérique pour collecter des données et faire de la “data science” dans le domaine de la santé. En matière de tests cliniques et de recherche médicale, la taille des échantillons étudiés et la quantité des données collectées sont déjà élevées : elles sont déterminantes pour la qualité de l’étude et la fiabilité des résultats obtenus. Mais l’échelle de collecte et de traitement de données ne permet pas encore de parler de « big data ».

Malgré l’importance de l’enjeu, les startups actives dans les big data et la santé sont encore peu nombreuses – et encore très loin de transformer radicalement les pratiques et le marché médical. La collecte et l’utilisation des données à propos des patients est très réglementée. Ces données sont aussi difficiles à harmoniser et à intégrer, pour plusieurs raisons : les médecins n’utilisent pas tous les mêmes standards ; les molécules identiques ne sont pas référencées de la même manière selon qu’il s’agit ou non de médicaments génériques ; les dossiers médicaux contiennent des données textuelles qui ne sont pas toujours structurées ; enfin, chaque centre de soin (clinique ou hôpital) fonctionne comme un silo d’informations, sans connexion avec les autres.

Quand on associe big data et médecine, on voit surgir les pires fantasmes : l’utilisation des données personnelles par des acteurs malveillants (compagnies d’assurance, employeurs, entreprises prédatrices), ou encore la multiplication des pratiques eugénistes et des formes sophistiquées de discrimination, qui viseraient à exclure les individus moins bien portants. Ces peurs sont loin d’être irrationnelles : les risques sont bien réels. C’est pourquoi il est essentiel de promouvoir une réglementation adaptée qui protège les données personnelles tout en permettant leur utilisation à des fins médicales.

Des volumes sans précédent de données médicales sont aujourd’hui disponibles pour faire avancer la recherche et les pratiques. Tim O’Reilly explique cela de manière lumineuse dans ce document : “Au cours des 60 dernières années de notre histoire médicale, nous avons traité les patients comme s’ils étaient tous ‘moyens’. Un docteur diagnostiquait une maladie et prescrivait un traitement dont les études cliniques avaient montré qu’il était efficace pour la plupart des patients”. Or, explique-t-il, deux facteurs sont susceptibles aujourd’hui de provoquer un changement de paradigme. D’une part, de nouvelles données sont disponibles en très grande quantité ; d’autre part, de nouveaux outils permettent de les exploiter comme jamais auparavant.

Plutôt que de se borner à développer des traitements efficaces pour la majorité des patients, il est désormais possible de subdiviser les patients en autant de sous-groupes. En déterminant ce qui différencie ces différents groupes d’individus (données génétiques, analyses hormonales et bactériologiques, etc.), le traitement peut être personnalisé pour chacun d’eux, avec pour objectif une augmentation globale des performances thérapeutiques. Plutôt que de se demander si un traitement est efficace en général, on peut chercher à savoir pour quels patients en particulier ce traitement est positif. Même un traitement qui fonctionne pour 1% des patients peut être développé, à condition de savoir identifier le petit nombre de patients susceptibles d’y réagir positivement.

Les géants du numérique s’intéressent aujourd’hui de plus en plus au secteur de la santé. Ainsi, Google a compris à quel point l’intégration et l’analyse de données en très grandes quantités pouvait engendrer des applications à  fort impact. En mai 2014, Google a investi 130 millions de dollars dans une petite startup qui promet de gagner la guerre contre le cancer grâce à l’intégration et l’analyse des données. La forte visibilité de ces innovations est une source d’inspiration pour les entrepreneurs du monde entier.

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Flatiron Health, fondée en 2012 par Nat Turner et Zach Weinberg, est une plateforme de cloud computing dédiée à l’amélioration des soins pour les malades du cancer. La startup a levé 140 millions de dollars auprès de plusieurs investisseurs, dont Google. L’objectif de l’entreprise consiste à organiser l’ensemble des données oncologiques produites dans le monde pour offrir aux praticiens une meilleure appréhension des besoins de leurs patients. Le Dr Krishna Yeshwant, de Google Ventures, explique que “le cancer nous touchera tous un jour ou l’autre, soit directement, soit en frappant un de nos proches. Flatiron a développé un moyen d’en apprendre beaucoup plus sur le cancer (…). Il est rare de trouver une équipe qui allie comme Flatiron Health les connaissances pointues du monde de la santé et le niveau technique des géants du numérique. Ils s’attaquent au plus gros problème de santé et les progrès accomplis sont déjà phénoménaux.

La société a dores et déjà utilisé les fonds de Google pour faire l’acquisition d’une société de logiciels médicaux, Altos Solutions, dont le principal produit, OncoEMR, est utilisé par plus de 1 300 oncologistes aux Etats-Unis. Les millions de dossiers médicaux intégrés à la plateforme ont permis à Flatiron de créer le plus grand pool de données oncologiques structurées au monde. L’essentiel de leur travail jusqu’ici a consisté à nettoyer ces données pour les rendre enfin exploitables. Les big data de Flatiron pourraient bientôt marquer l’avènement de la médecine personnalisée.

La collecte et l’analyse des données cliniques brutes ne fait encore que commencer. Les tests cliniques ne concernent jusqu’ici qu’un nombre infime des patients. On estime que 4% seulement des quelques 13 millions de malades aux Etats-Unis ont participé à des tests cliniques. Or ces 4% ne sont même pas représentatifs de l’ensemble des malades (par exemple, ils sont rarement choisis parmi les cancéreux tout juste diagnostiqués). Les données concernant les 96% de patients restants sont bien collectées, mais sont perdues pour l’analyse puisqu’elles restent bloquées dans les systèmes d’information hospitaliers de gestion des dossiers médicaux.

La prochaine étape pourrait consister à utiliser ces données médicales pour développer des médicaments. Honestica, startup française créée par l’un des fondateurs de Critéo, développe un dossier médical personnalisé pour créer de la valeur au centre des interactions entre les patients et leur médecin. Ces EMR (Electronic Medical Records) intégrés et structurés permettront d’identifier des patterns jamais vus auparavant et d’accélérer la recherche de nouveaux traitements. A mesure des progrès des big data dans la santé, des entreprises comme Flatiron ou Honestica pourraient un jour concurrencer les laboratoires pharmaceutiques grâce à la plus grande volumétrie de données dont elles disposent. Les laboratoires pharmaceutiques seraient donc bien avisés de regarder davantage ce qui se passe du côté des entreprises numériques.

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